Staffan de Mistura et la diplomatie en échiquier

Après une visite en Afrique du Sud, qui avait suscité moult réactions , Staffan de Mistura, l’envoyé personnel du Secrétaire général des Nations Unies pour le Sahara, a rencontré ce 11 mars, à Moscou, le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov sur invitation des autorités russes. Cette série de visites interviendrait dans un contexte où l’Algérie demeure absente des négociations sur le Sahara. Le déplacement de l’envoyé personnel serait-il pour obtenir le soutien de Moscou pour obliger Alger, partie prenante au conflit, à revenir à la table des discussions ?

En janvier dernier, la visite de Staffan de Mistura en Afrique du Sud a été marquée par un faux pas diplomatique, l’Afrique du Sud n’étant pas reconnue par les documents de l’ONU comme partie prenante au dossier du Sahara marocain. Cette initiative a été perçue comme une erreur diplomatique, d’autant plus que la situation actuelle ne justifiait pas une telle démarche.

A Moscou, la réunion avec le chef de la diplomatie russe s’est concentrée sur l’état et les perspectives du processus de règlement du Sahara. Le rôle stabilisateur de la Mission des Nations Unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental a été souligné. Un échange de vues a eu lieu sur les perspectives de relance du processus politique, compte tenu des contacts récents de Staffan de Mistura avec tous les acteurs intéressés.
« La Russie a souligné l’importance de parvenir à une solution juste, durable et mutuellement acceptable au problème du Sahara occidental sur la base des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité de l’ONU. », selon le communiqué du ministère des Affaires étrangères de la Russie.

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Au cours de la conversation entre Lavrov et de Mistura, un certain nombre d’aspects de la situation en Afrique du Nord et au Moyen-Orient ont également été abordés. D’une manière générale, il a été souligné que les activités de l’ONU restent demandées tant dans le domaine de la paix que dans celui du développement. Le même jour, Staffan de Mistura s’est entretenu séparément avec le vice-ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Verchinine.

Staffan de Mistura s’est rendu à Moscou malgré la neutralité habituelle de la Russie sur cette question. Bien que la Russie s’abstienne souvent de voter lors des décisions du Conseil de sécurité concernant la mission de l’ONU pour le référendum au Sahara occidental (MINURSO), elle a néanmoins exprimé un intérêt croissant pour la question du Sahara marocain.

Lors du 6ème Forum de coopération Russie-Monde Arabe tenu à Marrakech en décembre, le ministre russe des Affaires étrangères, Sergeï Lavrov, a réaffirmé la position de la Russie en faveur d’une résolution durable du conflit, basée sur les résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU. « Nous soutenons la recherche d’une solution durable, conforme aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité de l’ONU, et nous restons attachés à cette ligne de principe pour progresser vers des décisions appropriées », a-t-il déclaré.

Cependant, lors de sa visite à Moscou en juin 2023, le président algérien Abdelamjid Tebboune a tenté d’impliquer la Russie dans sa confrontation avec le Maroc, affirmant une « convergence de vues » sur la question du Sahara, une position que Vladimir Poutine n’a pas confirmée.

En 2023, M. de Mistura a habilement réussi à impliquer indirectement l’Algérie dans le processus politique, malgré son opposition lors de la dernière résolution du Conseil de sécurité, refusant de reconnaître sa part de responsabilité et cherchant à entraver la dynamique positive de la proposition d’autonomie du Maroc, qui bénéficie d’un large consensus international.

Malgré les liens militaires entre la Russie et l’Algérie, il est probable que la Russie adopte une position plus neutre en raison du conflit en Ukraine, où le Maroc a pris une position équilibrée. Les accords significatifs entre le Maroc et la Russie, notamment l’accord de pêche pourraient également influencer la position de Moscou.

La Russie, qui a répété qu’elle n’était pas une alliée militaire de l’Algérie mais plutôt un fournisseur, a récemment tenu à rassurer le Maroc que les exercices militaires conjoints avec l’Algérie ne visaient pas à déstabiliser le pays.
Face au récent rapprochement de l’Algérie avec l’Occident, la Russie pourrait maintenir une position « équilibrée » sur le conflit du Sahara, et pourrait même surprendre en soutenant le Maroc, compte tenu de la situation en Ukraine et des efforts d’Alger pour améliorer ses relations avec les Occidentaux.

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