Suicide au Maroc, le fléau prend des proportions inquiétantes

Quatre suicides ont eu lieu à Meknès durant ce mois d’avril. Ces drames, qui ont chagriné et fortement étonné les habitants de la capitale ismaélienne, se sont produits en l’espace de deux semaines, plaçant ainsi la ville parmi les villes marocaines enregistrant le plus grand nombre de cas d’automutilation.

Fondée au XIe siècle par les Almoravides en tant qu’établissement militaire, Meknès est devenue par la suite la capitale sous le règne de Moulay Ismaïl, fondateur de la dynastie alaouite.

Au fil du temps, la ville impériale a su s’imprégner de l’esprit des villes ancestrales. Elle a ainsi conservé son esprit d’antan, où le stress est loin d’être à l’ordre du jour pour le citoyen meknassi qui, jusqu’à un passé récent, préférait rester dans sa coquille et se vêtir de nonchalance, si le contexte le permettait.

Ces quatre suicides, survenus simultanément ou presque, ont mis en alerte les services de sécurité et les autorités locales qui se sont rapidement rendus sur les lieux pour constater les faits.

Le premier suicide concerne un militaire retraité, marié et père de trois enfants, qui s’est donné la mort à son domicile, dans l’ancienne médina de Meknès.

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Le deuxième, plus choquant encore, est celui d’un enfant de 13 ans, qui s’est suicidé en se jetant du quatrième étage de son établissement scolaire, dans des circonstances non encore élucidées.

Un autre cas de suicide a été enregistré lorsqu’une femme d’une quarantaine d’années a été retrouvée pendue à un olivier, dans la zone de Dkhissa, aux alentours de Meknès.

De même, un jeune homme d’environ vingt ans a été retrouvé pendu le vendredi 19 avril dans la maison familiale dans la région de Ouislane, près de Meknès. Pour mettre fin à ses jours, il aurait utilisé un câble électrique.

Des enquêtes et autopsies, ordonnées par le parquet, ont suivi leur cours, s’ajoutant ainsi à un autre drame signalé au niveau de la voie ferrée où un jeune homme s’est jeté il y a quelques semaines.

Pour chaque acte d’automutilation, les données collectées aideront à déterminer les circonstances et, par la suite, à établir un constat et donc à clore l’enquête. Bien que souvent, les causes de ces drames évoquent des problèmes de nature familiale ou sociale qui auraient induit un trouble ou une détérioration mentale.

L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a estimé en 2019 que près d’une personne sur huit souffrait d’un trouble mental, soulignant que le suicide touche une personne sur cent, établissant ainsi un lien étroit entre ces deux phénomènes à travers le monde.

Le Conseil Économique, Social et Environnemental (CESE) s’est intéressé à cette problématique. Dans une étude rendue publique en 2022, il a souligné la question de la santé mentale et des causes de suicide au Maroc. À cette occasion, il a signalé qu’en l’absence de statistiques exhaustives et précises sur l’investissement public en matière de santé mentale, il apparaît néanmoins que l’investissement réalisé par l’État dans ce domaine est manifestement insuffisant en termes de capacité litière et de ressources humaines.

En outre, le suicide, terme dont la définition est simple en apparence, est un phénomène à la fois intime et culturel. Ces faits, devenus très récurrents de nos jours, alertent certainement quant à une métamorphose de la composante du citoyen marocain.

De ce fait, plutôt que de se concentrer sur les cas particuliers de ces personnes automutilées, le temps est venu de dresser un tableau d’ensemble des tendances et d’en proposer une interprétation.

Si les chiffres évoquent un taux de suicide de 7,2 % selon les statistiques de l’OMS en 2019, il serait peut-être temps de définir une politique nationale de prévention du suicide. À ce jour, malheureusement, le Maroc n’en dispose pas.

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