France : La LDH dénonce un « tournant autoritaire » du gouvernement et un « mépris » de la démocratie parlementaire et sociale

La Ligue française des droits de l’homme (LDH) a dénoncé, jeudi, un « tournant autoritaire » du gouvernement et un « mépris » de la démocratie parlementaire et sociale en France, qui s’étend désormais aux droits fondamentaux.

La défense des libertés est devenue le « sujet le plus brûlant de la période » en France, alors que la liberté de manifester est mise en cause par le durcissement des instructions données aux forces de police et de gendarmerie, y compris à l’égard de citoyennes et citoyens non violents, ce qui se traduit par des blessures graves, des mutilations et par une instrumentalisation toxique des forces de police, écrivent Patrick Baudouin, président de la LDH et ses présidents et présidente d’honneur, dans une tribune collective publiée dans le quotidien Le Monde.

“On assiste ainsi au retour des charges de brigades mobiles à moto, proscrites depuis la mort de Malik Oussekine en 1986, et à un usage disproportionné d’armes qu’aucune autre police européenne n’emploie en pareil cas. À Sainte-Soline (Deux-Sèvres), de nombreux manifestants ont été blessés, dont deux en danger de mort, tardivement secourus”, dénoncent-ils, quelques jours seulement après que le Conseil des droits de l’homme ait rappelé la France à l’ordre concernant la situation humanitaire dans le pays, pointant notamment des attaques contre les migrants, le profilage racial, des violences policières et un usage excessif de la force par les autorités lors des manifestations.

À Paris, poursuivent les auteurs de la tribune qui accusent le gouvernement d' »agresser » les organisateurs, des manifestations ont été interdites au dernier moment et si discrètement que la justice administrative a désavoué le préfet de police.

La pratique devenue systématique d’interpellations « préventives » a empêché de manifester des centaines de citoyennes et citoyens qui n’ont évidemment fait ensuite l’objet d’aucune poursuite, note la tribune, ajoutant que la liberté d’association est logée à la même enseigne, d’autant que depuis 2021, le décret sur le « prétendu contrat » d’engagement républicain vise à asphyxier les associations indépendantes et critiques, dont plusieurs ont déjà été l’objet d’intimidations préfectorales.

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Et de poursuivre que chaque événement semble propice à ce gouvernement pour renforcer un appareil sécuritaire, faisant valoir que la « surveillance systématique de la population va augmenter du fait de la loi récente utilisant la perspective des Jeux olympiques pour introduire la surveillance de millions de personnes à la recherche de « comportements anormaux » par des drones et des caméras dites « intelligentes » ».

Les responsables de la LDH s’alarment aussi que les droits des étrangers, y compris le droit d’asile, vont à nouveau être restreints par un ensemble de lois dont le président de la République semble avoir déjà décidé du contenu.

« Et, comme toujours, la chasse aux étrangers continuera d’affaiblir les droits de toutes et tous. S’il n’avait tenu qu’à ce gouvernement, tous les enfants français de Syrie continueraient de croupir dans des camps. La LDH a été en première ligne du combat humanitaire pour leur rapatriement, inachevé à ce jour. Aujourd’hui, l’exécutif en vient à ficher ces mêmes enfants +préventivement+ en présumant une sorte d’hérédité terroriste. De ce côté-là, hélas, rien ne change », soulignent les auteurs de la tribune.

Ils estiment que le passage en force d’un pouvoir privé de majorité parlementaire, désavoué par une large majorité de citoyennes et citoyens, et contesté par la totalité des organisations syndicales de ce pays, vient de mettre en lumière un blocage sans précédent de l’agenda politique du « monarque républicain » et une crise démocratique profonde, touchant à la fois le fonctionnement réel des institutions de la République, le dialogue social, la confiance des citoyens en celles et ceux qui ont le devoir de les représenter et de les respecter.

« Tout se passe comme si le pouvoir actuel avait en tête, avec ce tournant autoritaire, de pouvoir sortir de son impasse politique en recherchant à tout prix une nouvelle majorité sans rivages à droite », renchérissent-ils, relevant qu' »agresser la LDH dans ce contexte est de bonne tactique. Tant pis si les citoyens ont été trompés, à qui l’on avait demandé de voter contre l’extrême droite (…) Tant pis s’ils doivent subir la régression des droits à laquelle ils pensaient faire barrage. Tant pis si tout cela ouvre la voie au pire ».

« Nous appelons au contraire l’ensemble des citoyennes et citoyens et des organisations attachées au respect de l’Etat de droit à se mobiliser face à des gouvernants qui semblent avoir perdu plus que leur sang-froid : le sens même de leurs responsabilités », conclut la tribune.

Avec MAP

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